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Paru le 28/04/2015

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Marillion - Quelque part avec Marillion - février 2007 (paru dans le Koid9 n°61)

QUELQUE PART AVEC MARILLION

Entretien avec Mark KELLY

Propos recueillis le 20 février 2007 par Marc Moingeon


En apprenant la sortie d'un nouvel album de Marillion, je réalise que cela fait déjà bientôt trois ans depuis que "Marbles" s'est retrouvé dans les bacs. L'album qui m'a semblé celui d'un grand retour en forme pour le groupe (dans sa version double CD) avait suffisamment de force pour satisfaire l'appétit de nouveauté pour un moment… Après un album très fort, nombre d'artistes peinent parfois à créer un successeur. Marillion n'aime pas se répéter, on le sait et "Somewhere else" est assez différent de "Marbles", plus concis, plus direct. L'album, qui cette fois, n'existe que dans une seule version, sera disponible à partir du 9 avril prochain.

Sur le site du groupe, www.marillion.com, il est possible de précommander l'album chez Townsend Records, ce qui donne droit aux acheteurs de recevoir en prime un DVD contenant 3 titres de l'album enregistrés lors du "Marillion Weekend" 2007.


En attendant, nous avons eu l'occasion de rencontrer Mark Kelly, claviériste du groupe, venu à Paris en compagnie de Steve Hogarth et de Ian Mosley pour promouvoir l'album. Un moment détendu avec un musicien éclectique, aussi simple que direct et honnête sur ses choix et ses goûts.


C'est Mark qui commence la conversation en observant la publicité pour les concerts de The Musical Box au dos de Koid'9 n°60 :

C'est un beau fanzine. Oh, vous avez déjà assisté à un concert de The Musical Box, je me demandais à quel point ils étaient bons ?


Je ne les ai jamais vus encore. Apparemment, ils ont l'aval des membres et ex-membres de Genesis. On dit même que Peter Gabriel leur a prêté ou offert une partie de ses déguisements de scène qu'il avait gardés.

Oh, vraiment ? Cela semble un concept un peu étrange mais après tout, puisque l'on ne peut plus voir l'original...C'est un peu comme lorsque l'on va assister à un concert de musique classique. Personne ne pense qu'il va voir Mozart jouer du piano. Et là, c'est un spectacle.

Peut-être y aura-t-il y a un tribute band à Marillion ?

Oh, mais il y en a au moins un ! Ils s'appellent Forgotten Sons et sont écossais. Nous avions entendu parler d'eux et, lors de notre dernière tournée, un jour où nous étions là au moment où ils jouaient dans un pub, Ian, Pete et moi sommes arrivés dans la salle et sommes passés devant la scène pour aller nous asseoir. Ils nous ont reconnus et ont ouvert de grands yeux, car ils n'avaient aucune idée de notre visite… (rires). Nous sommes venus sur scène pour interpréter quelques morceaux avec eux. Leur chanteur ressemble étonnamment à Fish sur le plan vocal et lors de la dernière convention Marillion, nous l'avons invité et nous avons interprété "fugazi" avec lui. C'était très sympa.


Pouvons nous revenir un instant sur "Marbles" ? Avec le recul, comment jugez-vous la manière dont vous avez géré sa distribution, sous deux versions etc., ce qui a déclenché un certain nombre de controverses ?

Sur le plan artistique, nous étions très fiers de cet album et le fait de le proposer en coffret avec cet énorme livret était quelque chose qui me plaisait beaucoup. Mais il y avait aussi les considérations financières. Evidemment, vous savez qu'il se vend de moins en moins de CD. Nous souhaitions aussi que les fans viennent directement nous l'acheter plutôt que d'aller en magasin, dans ces conditions. Nous pensions que nos plus grands fans voudraient la version complète, la plus belle et la plus chère. Le CD simple… on nous a dit et redit que les double CD se vendaient nettement moins bien que les simples. Là aussi, on s'est dit que le prix plus élevé risquait de décourager l'amateur de musique moyen. Mais en même temps, nous avons pensé à ceux qui avaient acheté l'album en magasin, savaient qu'il y avait une autre version plus longue et se sentiraient floués. C'est pourquoi nous avons fait cette version complémentaire disponible sur notre site.

En fait, pour être franc, ce concept de faire commander un album de Marillion, que nous avions déjà fait avec "Anoraknophobia" d'ailleurs, je pense que c'est vraiment demander aux gens de nous prêter de l'argent car il fallait précommander tellement longtemps à l'avance… C'est demander une faveur. On peut le faire une fois ou deux, mais après cela, certains pourraient dire que nous profitons d'eux. Cette fois, nous avons réussi à financer l'enregistrement de cet album à partir des profits réalisés sur "Marbles" et sur nos "week-ends Marillion", que nous faisons chaque année, par exemple. Maintenant, les gens peuvent précommander l'album aujourd'hui mais il sort bientôt, début avril.


Parlons de "Somewhere else". Avez-vous travaillé de façon habituelle, qui consiste à répéter, improviser avec Dave Meegan, votre ingénieur son, qui enregistre tout et vous aide à extraire les meilleurs moments pour bâtir les nouveaux morceaux ?

Oui, en quelque sorte, excepté que nous n'avons pas travaillé avec Dave cette fois-ci, mais avec Michael Hunter, que nous connaissons depuis longtemps, depuis "Brave" en fait. Il travaillait dans le studio où nous avions enregistré cet album. Il a aussi enregistré un petit album qui servait d'intro de nos concerts de cette tournée. Et Mike a déjà mixé quelques titres de "Marbles". Il a déjà travaillé avec des groupes comme Coldplay et Mansun. Nous avions aimé son travail sur les morceaux de "Marbles", alors bien que nous soyions très contents de Dave Meegan, nous avions envie de changer un peu. Mike travaille de manière différente par rapport à Dave. C'est un musicien, un bassiste à la base, mais il joue aussi d'autres instruments, il bricole avec des tas de choses, il aime faire des effets sonores, etc. Sinon, nous avons effectivement joués pendant qu'il enregistrait, comme nous le faisons d'habitude, mais parfois, il partait avec les bandes, revenait pour nous les faire entendre et il avait ajouté quelque chose, il avait fait un peu d'orchestration. Ils nous a dit : "Vous savez, je ne cherche pas à intégrer le groupe !" (rires). Mais la plupart du temps, nous avons apprécié ses arrangements. Il y a plusieurs de ses idées sur le mixage final. Par exemple (il cherche, hésite… je lui montre la liste des titres que j'ai tapée - NDR)…Ah, oui, prenez "the last century for man", nous avions le couplet et le refrain qui sortaient d'une jam et… vous voyez la partie centrale plus enlevée et orchestrale ? C'est lui qui l'a conçue. Il a eu un rôle assez important dans le son de l'album.


Je trouve que cet album est relativement proche de "Marbles" et "Afraid of sunlight", mais surtout très mélancolique, êtes-vous d'accord ?

Oui, bien que ce ne soit pas un album concept. En gros, les sujets abordés tombent dans deux catégories. Premièrement, Steve H a récemment divorcé de son épouse avec qui il était marié depuis 20 ans. Cela a généré un thème qui court ici et là tout au long de l'album ; c'est notamment le sujet du morceau "somewhere else". Deuxièmement, il y a son regard sur le monde, lequel ne semble pas trop s'arranger il faut bien l'avouer. Difficile d'ignorer tout ce qui s'est passé encore durant l'année passée. Mais c'est vrai que cela conduit à une vision parfois lugubre. Par exemple, si on prend "last century for man"… je ne suis pas convaincu que c'est le dernier siècle de l'humanité.


Vous avez donc essayés de rassembler des morceaux qui s'assemblaient autour de ces thèmes ?

Oui, on a choisi les morceaux qui nous semblaient aller le mieux ensemble. En fait, nous en avions environ 18, et nous avons fini par en enregistrer 16. "Faith" date déjà de la période "Marbles", et nous l'avons incluse car elle était un peu plus positive, ce qui était pas mal pour terminer l'album, comme nous l'avions fait avec "made again" que nous avions placée à la fin de "Brave". Certains de nos autres morceaux iront sur notre prochain album.


On peut dire que "Somewhere else" est un peu plus orienté pop/rock que "Marbles", non ?

Oui, il est un peu plus direct. Ce n'était pas vraiment notre intention au départ. Mais peut-être qu'en vieillissant, on devient un peu plus critique à propos de notre musique. Parfois, j'écoute certains vieux morceaux du groupe et je me dis que nous n'avions peut-être pas besoin de telle ou telle partie, que ces morceaux étaient un peu trop longs.


Mais pourtant "ocean cloud" sur la version double de "Marbles" était votre plus long morceau depuis "grendel" !

Exact ! En fait, je dirais aussi que la longueur des morceaux vient de la quantité de paroles que nous voulons y inclure. Dans ce morceau, cependant, c'est plus atmosphérique, et nous avons laissé la musique se développer. Mais sur "Somewhere else", si on prend "the other half" ou "thank you" et en particulier "most toys", c'est plus simple, très simple même. En fait, "most toys" est le morceau de l'album que j'aime le moins, il n'a pas grand-chose à dire, donc il dure 2:45 !


Et comment sont les autres morceaux, ceux qui n'ont pas fini sur "Somewhere else" ? Plus rock, plus optimistes ?

Hmm… Pas plus gais, non, certainement pas ! Globalement, je dirais qu'ils penchent plutôt du côté calme, lent et triste. On verra, nous avons ces titres et nous allons en écrire d'autres, et qui sait, peut-être que nous en utiliserons sur le prochain album, que nous devrions sortir en 2008.


Oh, si vite ? Cela semble un peu surprenant aujourd'hui mais ceci dit, c'était la norme dans les années 70, voire même deux albums par an. Et vous en avez sorti plusieurs assez vite, à un moment.

Oui, pourquoi ne pas faire un album par an si nous le pouvons ? Comme vous le dites, cela se faisait couramment et, par exemple, Yes a sorti ce que je pense être ses trois meilleurs albums en l'espace de 2 ans. Parfois, en vieillissant, le processus se ralentit, on devient plus critique avec soi-même… mais bon, nous avons envie de sortir le prochain l'année prochaine.


Combien de temps avez-vous mis pour écrire "Somewhere else" ?

En fait, dès que la tournée "Marbles" a été terminé, nous avons recommencé à jouer et à enregistrer, mais nous n'étions pas contents de ce que nous avons produit et nous avons tout jeté. C'était trop tôt, alors on a fait un break et en 2006, nous nous y sommes remis sérieusement. Et comme je vous l'ai dit, nous avons quand même réussi à sortir 18 morceaux, deux ne sont pas vraiment encore finis mais il y a pas mal de choses que j'aime bien.


Parlons du claviériste que vous êtes. Comment est-ce de travailler avec Steve H qui est lui aussi un claviériste à la base ?

Je n'ai aucun souci avec ça. Si parfois Steve compose quelque chose sur le piano, il arrive qu'il le joue sur l'album. Et en live, c'est bien car il y a des morceaux où je ne peux pas jouer toutes les parties de claviers des versions studio, comme sur "fantastic place" : il y a le piano et toute l'orchestration de cordes… Je ne pourrais pas jouer les deux. Dans ces cas-là, c'est bien qu'il puisse se mettre lui aussi aux claviers.


Arrivez-vous parfois avec des morceaux plus ou moins finis que vous présentez aux autres membres du groupe ?

Finis, non, tout simplement parce que je n'écris pas de paroles. Mais musicalement, j'ai écrit un certain nombre de choses, comme la musique de "thank you whoever you are", "a voice from the past", "last century for man", la deuxième partie de "the wound", une bonne partie de "somewhere else" est basée sur ce que j'ai écrit aux claviers aussi.

Ceci dit, prenons l'exemple de "a voice from the past" : j'avais le motif depuis un moment au piano, Mike (Hunter) l'aimait vraiment bien et nous disait que nous devrions faire quelque chose avec. Steve s'est mis à écrire des paroles pour ce morceau. A ce moment, on sait que cela va devenir une chanson. C'est allé assez vite.


Techniquement parlant, que pensez-vous de tous ces instruments virtuels qui se développent ?

Oh, je n'utilise quasiment plus que cela désormais. Certains semblent déçus que je n'aie plus tous ces claviers autour de moi sur scène, mais ce n'est plus nécessaire. Les sons que je charge dans mes claviers viennent souvent de ces instruments virtuels. Par contre, pour l'enregistrement, Mike pense que nous devons utiliser autant que possible de véritables instruments. Alors, on a un vrai piano acoustique, un vrai piano électrique, un vrai glockenspiel.

Ceci dit, je trouve que les progrès accomplis en matière d'échantillonnage, notamment dans les 5 dernières années, ont été énormes. Dans certains cas, il est vraiment très difficile de distinguer si ce sont les instruments originaux ou pas.


On ne risque pas de se perdre parmi le nombre énorme de possibilités ?

Oh, j'utilise beaucoup de sons assez traditionnels, vous savez : pianos, orgues, cordes. J'utilise pas mal aussi un effet qui me fait sonner comme une guitare, on le retrouve sur "see it like a baby", entre autres. Et le son très organique de l'ensemble vient aussi de Mike. On lui fait confiance, c'est son travail de producteur. Ça ne veut pas dire que nous avons accepté tout ce qu'il nous a proposé ! Il nous est arrivé de l'envoyer tout refaire.


Y a-t-il des disputes au sein de Marillion, sur l'orientation musicale le choix des morceaux ?

Oh, cela arrive de temps en temps. Jamais de grosses disputes. Il arrive que nous arrêtions de travailler, que chacun reparte chez soi. Mais nous nous recontactons assez vite et tout repart. Je dirai qu'avec l'âge, nous avons tous appris à mieux travailler ensemble. Marillion reste un groupe assez démocratique ! Si quelqu'un déteste vraiment un morceau, on ne le mettra pas sur un album. Il y a des choses que l'on préfère et d'autres dont on est moins content, comme moi avec "most toys", par exemple, mais bon… faire parti d'un groupe, c'est aussi savoir faire des concessions.


Pour finir, une petite question sur vos goûts qui semblent très éclectiques. Par exemple, sur le site de Marillion, vous listiez à un moment votre "top 10"et on y trouvait des albums qui n'étaient pas du tout basés sur les claviers, comme "The bends" de Radiohead… du Led Zeppelin, des trucs assez rock finalement... Vous écoutez aussi de la musique instrumentale ?

Oui, mais cela changerait si je refaisais la liste aujourd'hui. Je me rappelle avoir mis aussi un album de Van Halen ! Et du Yes… En fait, je suis un amateur de morceaux chantés, je ne choisis pas ce que j'aime en fonction de la présence des claviers dans les arrangements. Côté instrumental, j'apprécie certaines choses de Vangelis par exemple.


Merci et à bientôt en concert !


Par ailleurs, il est possible de télécharger des concerts entiers de la tournée solo que Steve Hogarth a effectué en 2006. L'année dernière, H a donné une série de concerts seul au piano, où il reprenait suivant l'humeur du moment, une série de morceaux "qui ont compté pour lui", des titres des New Europeans (dont il fut le claviériste), de son album solo et de Marillion, mais aussi des reprises de ses artistes favoris comme Bowie, David Sylvian, XTC et bien d'autres encore. Chaque concert a donc été différent.

Un DVD live de l'un de ces concerts est d'ores et déjà disponible mais il est également possible de télécharger en format mp3 ou pour 11 euros avec un tarif dégressif.

Renseignements, écoute d'extraits et zone de paiement (avec version française complète dans la section "read me" ) à cette adresse : www.h-tunes.com

- DVD disponible sur http://www.marillion.com/music/solo/h-natural-dvd.htm

- Ecoute d'extraits sur www.myspace.com/hnatural



Voir la chronique de Somewhere Else

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